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Urgences

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Me voici aux urgences, mais sans George Clooney – ni même son non moins célèbre quasi-homonyme Georges Clooney.

Rien de grave, je te rassure.

Juste un putain de mal de bide – avec une douleur atroce, inconnue au bataillon, et cette impression hyper-désagréable que toutes mes entrailles se compressent contre mes poumons et bloquent ma respiration.

Je voulais rentrer à l’appart’ et consulter un médecin, mais de là où j’étais, incapable de me rendre chez moi. Alors un véhicule du SAMU m’a déposé aux urgences.

Sur la route de l’hôpital j’ai eu le temps de discuter avec l’ambulancier couvert de tatouages – les études qu’il a dû faire pour en arriver là, son quotidien.

Ensuite le gars du SAMU a rempli mon dossier à l’accueil et on m’a collé dans un fauteuil roulant et on m’a fait rentrer dans une espèce de couloir, une zone tampon entre l’entrée de l’hôpital et les urgences proprement dites.

Et c’est l’attente, l’attente interminable – alors que la douleur se calme peu à peu – mais ne cesse pas totalement.

Je prends mon mal en patience, je lis mon bouquin – où que je sois, j’ai toujours un livre sur moi – cette fois c’est « Le Messie de Dune » de Frank Herbert.

On me demande à combien j’évalue ma douleur sur une échelle qui va de 1 à 10. « 5 », je dis – et j’en sais foutre rien, c’est tellement subjectif tout ça… Mais ça va, la douleur est pas insurmontable – je peux encore trinquer, j’ai pas à me plaindre.

À côté de moi un gars s’installe – un gars chelou qui pue l’alcool – il semble parfois agressif. Putain qu’est-ce que je fous là ? Et la douleur reprend et me cloue au fond du fauteuil roulant. Le type dit qu’il veut aller fumer dehors mais en fait il veut se casser de là.

Je regarde les infirmières, désespéré. Elles doivent en voir des vertes et des pas mûres, celles-là… D’un air bourré de compréhension, une d’entre elles me dit qu’il y a deux personnes avant moi. Une heure après, c’est mon tour. On me met dans un lit roulant, puis dans un box.

les rideaux

les rideaux

Je suis entouré de rideaux – bleu ciel sur les côtés, orange en face. On me demande de mettre une sorte de nuisette pas du tout sexy – une blouse en fait, que je me galère à refermer par derrière.

Je fixe le plafond des yeux. C’est tout ce que je peux faire. Mon bouquin est fini depuis longtemps.

Une infirmière me sort de mes rêveries – elle déboule, et sans perdre de temps, mécaniquement, me fait une prise de sang. Puis elle profite de la perforation veineuse qu’elle vient de faire au creux du coude pour me coller un cathéter dessus et me mettre sous perfusion.

Cathéter

Cathéter

La médecin vient me voir – en attendant les résultats elle me fait part de ses observations : d’après elle ce serait un truc que j’aurais mangé au Kazakhstan qui passerait pas. Mouais… Je suis pas convaincu – ça fait quand même [ au moment où j’écris ces lignes, comme je peux de la main gauche – je suis droitier mais je peux pas trop utiliser ma main droite à cause du cathéter ] plus de dix jours que je suis rentré, depuis le temps, des intoxications alimentaires, j’aurais pu avoir trois ou quatre…

La médecin part en laissant le rideau orange ouvert – j’ai vue sur le couloir. Un gars dans une chambre en face s’est « délivré ». Il s’est dépiqué. Il erre hagard dans le couloir – les infirmiers le retrouvent vers les toilettes, pissant le sang de partout, et du sang partout dans la chambre – scène de meurtre sanguinaire – du sang et autre chose que j’arrive pas à identifier – de la merde ? – sur les draps, sur le sol, partout.

J’arrête pas de faire la sieste : un petit roupillon sur le fauteuil roulant, un petit somme sur le lit, sous perf’… Y’a pas à dire, j’ai pas à me plaindre – le service est top, trois étoiles, rien à ajouter.

Mais depuis les tréfonds de mon lit, autour de mon box, j’entends la douleur – des gémissements, des râles, des cris de plus en plus stridents. La souffrance est partout, je ne demande qu’à la fuir.