J’étais arrivé à une période de ma vie où je commençais à comprendre que le bonheur – le bonheur pur, constant, idéal –
existait pas.
C’était un état qui était sans doute perpétuellement
« à rechercher »
mais je savais pas par
où bordel commencer – je me posais
même pas cette question en
vérité – tout aveuglé comme j’étais de brûler la
vie par les deux bouts – le petit Ben aux allumettes – tout
flamboyant guettant pschhhhhhh des bâtons de dynamite – et en vérité aussi je
m’emmerdais grave.
« La route, la route… » je jurais que
par elle oh oui la route prenons la ensemble peu importe la
destination ce qui compte c’est la route et j’en ai
écrit des pavés sur la route – et je comprenais soudainement que pour toi ont était pas « sur » la route – on était
même pas « au bord de » la route – en fait cette route dont je
te parlais tout le temps un murmure un cri une litanie depuis le
jour où on s’était connu tu y
croyais pas.
Tu y avais jamais cru en vérité –
Tu t’étais engouffrée dans un
délire avec moi – un délire délicieux que je t’offrais sur un plateau – parce que c’était fun parce que ça
faisait des trucs à raconter plus tard au coin du feu à tes
petits enfants. C’était une aventure qui allait t’arriver qu’une
seule fois dans la vie – parce que c’était unique extraordinaire – parce que ça te changeait tellement de
ton train-train quotidien.
Mais tu y adhérais pas en vérité – tout ce que tu voulais après
nos voyages nos tracés sur le bitume – c’était y revenir – dans ton quotidien – et de t’y ancrer – jusqu’à la prochaine fois, la prochaine
folie.
Et moi en vérité j’y croyais. C’était tangible. On pouvait
passer toute notre vie comme ça – à bourlinguer – une vie faite d’amour de macadam et d’eau fraîche.
Quelle connerie!
Et le pire dans cette histoire c’est que tu m’avais donné l’envie et
les raisons d’y croire et en vérité tout était que chimère.
Mais est-ce que tu avais pas raison? Te fixer plutôt que
te détruire à cramer l’asphalte? Et vivre un peu de la vie dont on a un jour rêvé – l’avoir à
portée de main, la frôler du bout des doigts – des vagabonds sans étoiles, des bandits de grand chemin.
Il suffit d’y croire pour y être.
La VRAIE vie – où personne nous demande rien – où personne se met sur notre chemin. Où RIEN est
impossible.