Dans (m)(s)a ligne de mire il y a
ces deux années de perspectives
Ces textes crachés instantanés
perdus sur les Internets
ces mots inventés
qui reviennent tout le temps –
Dans sa ligne de mire il y a
Ce mec qui marche toujours parmi les ombres
le froid la nuit tombée au bord du canal
– démarche chaloupée dans les feuilles mortes qui pourrissent
les lampadaires qui fonctionnent plus
– sans ses écouteurs désormais
– cassés broyés rincés –
mais bientôt la lumière stridente du métro.
Dans le métro parfois
la fille aux cheveux tondus
– portrait-mirage de la Femme Piège
– il l’a toujours pas abordée.
Dans sa ligne de mire il y a
Au petit déjeuner plus de Quaker Oats
il en a bouffé jusqu’à écœurement
– depuis il se la joue plus sobre et plus cancérigène
avec les cafés-clopes qu’il s’enchaîne.
En partant de chez lui les matins
pour aller au boulot
après avoir craché ses mots
le tic ou le toc a disparu
il vérifie plus que sa porte est fermée
– comme s’il en était guéri.
Dans sa ligne de mire il y a
des déserts
des villes
la vie
des boîtes glauques
des bars louches
et autres décors fantasmagorés
avant de les avoir vus en vrai.
Dans sa ligne de mire il y a
la veuve-enfant qui pleure son mariage irréalisé
les zombies qui le hantent encore
qui sont plus là ou qui ont jamais existé
éphémèrimaginés
souverêvés.
Dans sa ligne de mire il y a
ces pigeons casaniers
Diya Marcelline et le petit dernier
Dans sa ligne de mire il y a
ces textes encore inachevés
ces mots envolés perdus
ces couleurs chaudes ou délavées
ces jeans troués
ces radeaux de la méduse
ces parfums d’alcôve
au gré des rencontres
Dans sa ligne de mire il y a
tous les concerts toutes les soirées
à pogoter dans l’espace
flaques de bière chaude sur les parquets
Dans sa ligne de mire il y a
tous ces voyages en train
ces milliers kilomètres de routes macadamisées
tous ces points A ces points B
quelque chose a changé, sans doute
il comprend que la destination est peut-être importante
– finalement.
Dans sa ligne de mire il y a
tous ces parcs luxuriants
appels à se loutrer
mais le vent tourne
l’herbe s’amollit
les paysages défilent
et le ciel est changeant.
Dans ma ligne de mire il y a ces deux années de perspectives
Et au delà la ligne d’horizon
où se rejoignent les points de fuite
discordants.